➳ Colin Crapahute

Aztlan: retour d'expérience sur la fabrication d'un escape-game

En sous-marin, moi et ma mère avons créé un escape-game ou jeu d'évasion pour sa classe de collège. Vous trouverez dans cet article une analyse que j'espère assez poussée mais accessible à quiconque voudrait se lancer dans une création de ce genre ! C'est une lecture conséquente j'en conviens, mais il y a là-dedans beaucoup de choses à brasser je crois. Prenez votre temps !

N'hésitez pas à nous faire des retours si vous avez des questions ou des remarques: obigre@protonmail.com

session de jeu 1

Ce que nous voulions faire

La genèse

Nous sommes deux à l'initiative de ce projet, mère et fils: Patricia et Colin.

Moi Colin, je suis amateur de jeux en tous genres - comprenez amateur comme dans "j'aime et j'apprécie" - et je n'en loupe pas une quand on me propose de bidouiller des petits machins ludiques. Ma mère Patricia est professeure d'espagnol en collège et aime proposer des façons intéressantes d'apprendre la langue qu'elle aime.

En avril 2022, Patricia me dit qu'elle aimerait faire un grand jeu en fin d'année pour récompenser ses élèves, et s'amuser un peu avec les notions qu'ils ont vues pendant l'année, histoire de terminer l'année sur quelque chose d'un peu différent.
Bon évidemment, avril 2022 pour juin 2022 ça fait court comme délai (très, très court même) mais ça on le savait pas encore.

L'idée est lancée !

Les conditions de création

Patricia et moi n'habitons pas au même endroit: il y a au bas mot 6 heures de routes en voiture qui nous séparent, il nous fallait donc nous organiser des rendez-vous régulier pour travailler ensemble.
Bien sûr le travail à distance était possible mais en ce qui me concerne ça ne me convenait pas du tout. Déjà ça m'enlevait un prétexte pour aller voir ma famille et retrouver la Bretagne (bouhou), d'autre part j'avais besoin du savoir-faire de ma professeure de mère, de sa connaissance de la langue, du niveau de sa classe, des outils pédagogiques à utiliser, et des équipements dont elle disposait... et elle avait besoin de ma vision d'ensemble sur le projet, d'une personne qui pourvait lui répondre "ça on peut faire" et "ça on peut pas" (on réalité on peut tout, mais le truc c'est de refuser ce qui est trop compliqué).

Ensuite, nous nous mettons d'accord pour commencer par un escape-game à notre portée: nous n'utiliserons pas d'outils que nous ne savons pas déjà maîtriser. Aussi, pas de jeux numériques, pas de QR codes, pas d'objets trop farfelus ou de projet gigantesque. L'objectif est de créer un jeu pour ses élèves avant tout, pas de se tuer à la tâche en recherches infinies ou en bricolages brinqueballants.

Dès le premier mois donc, nous commençons à mettre des idées sur le papier.

Les conditions de jeu

Un premier point sur lequel il nous a fallu se mettre d'accord au plus tôt était les conditions dans lesquelles le jeu serait joué. Voici ce que nous avons décidé, dans le désordre, et je reviendrais sur chacune de ces décisions en précision plus loin.

Le jeu devra:

  1. être en langue espagnole, et sur une thématique hispanique
  2. permettre à chacun de participer quelque soit son niveau dans la matière
  3. avoir lieu dans une même unité de temps et de lieu

1. Thématique hispanique

Evidemment, un jeu en langue espagnol était condition sine qua none. S'amuser c'est bien, mais si ça peut avoir un petit intérêt pédgogique c'est encore mieux ! Le but étant de réaborder tout un tas de compétences acquises au cours de l'année ou des années collège au travers d'un jeu marrant qui recontextualise ces compétences. (on verra plus tard lesquelles)

Déjà il nous faut un thème excitant et rigolo, qui nous laisse des libertés d'inteprétation. Tout de suite c'est l'Amérique latine qui nous appelle: les temples perdus, les civilisations oubliées, les pièges, les légendes... une aventure vue et revue au cinéma mais qui fait toujours autant rêver.

Nous jetons notre dévolu sur les Aztèques, sur initiative de Patricia je crois qui n'avait pas trouvé le temps d'en parler cette année avec ses élèves. Parmi les différents peuples autochtones d'Amérique du Sud, les Aztèques sont aujourd'hui parmi les plus connus, ce qui offre une grande variété de sujets les concernant: mythologie, religion, société, histoire... et les pays qui couvrent leur ancien territoire sont hispanophones.

L'intérêt de ce thème, c'est aussi qu'il fait partie de la culture populaire: suffisemment connu pour ne pas être totalement perdu, mais assez mystérieux pour encore intéresser. Comme le niveau des collégiens dans la langue est très hétéroclyte (médiocres comme excellents d'un jour sur l'autre, d'un exercice à l'autre...), il est important d'avoir un thème qui leur soit au moins vaguement connu, afin qu'ils aient un univers auquel se ratacher et dans lequel puiser des informations qui ne relèvent pas toujours de leurs compétences en classe, mais aussi de leurs connaissances propres.

2. Accessibilité

Un jeu d'évasion (ou escape-game comme on le connaît si bien) se joue généralement par équipe de 4 ou 5: ce nombre permet à chacun de se trouver une place, d'avoir toujours quelque chose à faire, pour que personne ne soit laissé ou perdu dans l'aventure. En somme, le jeu se base sur la coopération et la complémentarité des compétences individuelles.
Sauf que là... nous devons travailler avec des classes entières de 25 élèves, ce qui est très loin d'une équipe d'évasion habituelle. Une coopération à cette échelle nécessiterait une sorte d'organisation plus claire pour être efficace, ce qu'on ne peut pas laisser au soin des joueurs sur un temps de jeu aussi court.

Nous décidons rapidement de découper chaque classe en petites équipes de 4 à 5 joueurs, pour recréer cette émulation de petit groupe propre aux jeux d'évasion. Une méthode qui sera facile à mettre en place puisque ses classes de 3ème ont l'habitude de fonctionner en îlots de 5 tables pendant les cours.
En théorie, chaque équipe se verra attribuer une énigme qu'elle devra résoudre indépendemment des autres, et chaque victoire permettra au groupe entier de se rapprocher de la solution finale (plus de détails là-dessus aussi plus tard).
Ainsi nous donnons un objectif clair à chaque petit équipe, mais nous gardons le silence sur l'éxécution de la solution finale, qui nécessitera de la coopération entre tous, indépendemment de leur équipe de départ.

3. Unité de temps et de lieu

Organiser un jeu d'évasion dans un collège, ça peut relever de l'exploit. Il faut trouver une salle disponible, la réserver, et la meubler pour l'occasion. Très vite nous décidons de mettre en place le jeu dans la salle de cours de Patricia, qu'elle occupe 99% du temps, et sur des temps de cours déjà prévus avec les élèves : celà évitera d'avoir à gérer l'organisation auprès des autres professeurs, des autres classes, et de l'administration.

Dans le collège de Patricia, une "heure de cours" dure 55 minutes. Les exercices qu'elle a l'habitude de faire en classe (souvent pris dans des manuels de cours, adaptés ou inventés par elle) prennent aux élèves entre 20 et 30 minutes à compléter. C'est une base stable sur laquelle nous décidons de nous calquer pour appréhender le reste du jeu. A ces 30 minutes d'énigme/exercice, nous ajoutons 10 minutes de flottement pour les fouilles dans la pièce et le partage d'informations entre équipes. Enfin, celà nous laisse environ 15 minutes d'introduction et de conclusion, pour expliquer le jeu et ses règles avant qu'ils n'entrent dans la pièce, et gérer les élèves à la fin du jeu, accueillir leurs retours et conclure le jeu sans précipitation.
Un calcul parfait et sans aucun oubli ! Aucun ! (évidemment, il y en avait)

Ce que nous avons préparé

La structure du jeu

AZTLAN est un jeu d'évasion pour 25 élèves d'espagnol en classe de 3eme, répartis en 6 équipes de 4. Le jeu est composé de 6 énigmes indépendantes et d'1 énigme finale commune.

Déroulement

Il est prévu que le jeu puisse se dérouler sur une heure de cours, soit 40 minutes de jeu, et 15 minutes environ de préparation et de débrief.

Après les explications et consignes de début de jeu, les joueurs sont lâchés dans la salle de jeu. Voici les étapes par lesquelles ils doivent passer pourra réussir le jeu.

  1. Réflexion: 6 énigmes sont exposées sur les 6 ilots de tables. chaque équipe doit résoudre une énigme, qui leur donnera une combinaison de symboles.
  2. Fouille: d'après les instructions fournies par la combinaison des symboles, les joueurs fouillent la pièce à la recherche de l'indice. si la fouille ne donne rien c'est que la suite d'instructions était mauvaise, et que l'énigme était mal résolue: retour à l'étape 1.
  3. Mise en commun: une fois l'indice trouvé, ils l'apportent au reste du groupe pour tenter d'assembler les differentes pièces du puzzle (le "mural"). Si les indices assemblés ne sont pas suffisants pour reconstituer le puzzle: retour à l'étape 1.
  4. Code secret: le "mural" assemblé donne aux joueurs le code d'ouverture pour le cadenas, qui ouvre le coffret dans lequel ils trouvent leur récompense, et la clé symbolique qui ouvre la porte et sonne la victoire du groupe tout entier ainsi que la fin du jeu

Une fois que le jeu est terminé, les élèves sont libres de sortir de la salle.

Le scénario

Des travaux dans le centre de Mexico ont déterré un ancien temple aztèque qu'on soupçonne rempli de trésors, mais le site est très instable et menace de disparaître sous les eaux. Vous incarnez une équipe internationale et chercheurs spécialistes dans les situations d'urgence: vous avez une heure pour ramener le plus de richesses et de connaissances possibles de ce temple retrouvé.

Ce scénario est présenté aux joueurs en introduction par la personne qui anime le jeu, avant qu'ils n'entrent dans la pièce.

Les énigmes

Chaque énigme est developpée pour se focaliser sur une compétence évaluée en cours d'espagnol.

Encodage des réponses par les symboles

Pour compliquer l'étape de la fouille après certaines énigme, et lancer les joueurs sur de potentielles fausses pistes, les indications qui servent à trouver les indices sont encodées par des symboles. Chaque symbole est associé à une indication de lieu, ainsi plusieurs symboles assemblées donnent l'emplacement précis d'un indice.

firefox_ZhoPFHVYNT.png

La liste de ces symboles est accrochée au mur à la vue de tous.

Liste des énigmes

1. Tenochtitlan (plan)

https://nuage.girofle.cloud/apps/files_sharing/publicpreview/LkE55RgRxe65Xmo?file=/&fileId=304990&x=1366&y=768&a=trueEn suivant deux suites d'instructions données par les documents, les élèves doivent terminerp leur parcours sur deux symboles.

Matériel: des impressions couleur, pour certaines aggraphées en livret, pour certaines redécoupées
Compétence: savoir se repérer sur un plan, suivre des instructions
Sujet associé: Tenochtitlan, la mythique capitale des aztèques, berceau de l'actuelle capitale de Mexico

2. Recetas (conjugaison)

https://nuage.girofle.cloud/apps/files_sharing/publicpreview/qtXxpoBWo7ot9FA?file=/&fileId=304912&x=1366&y=768&a=trueEn repérant et en reportant les verbes conjugués surlignés dans le cahier TESORO AZTECA, les joueurs révèlent deux chiffres, qui correspondent chacun à un symbole.

Matériel: des impressions couleur, pour certaines agraphées en livret
Compétence: compréhension écrite, conjugaison
Sujet associé: les plats typiques mexicains d'origine aztèque

3. Alimentos (mots-croisés)

https://nuage.girofle.cloud/apps/files_sharing/publicpreview/ArmxcGNHDqJD3X7?file=/&fileId=304979&x=1366&y=768&a=trueEn remplissant les mots-croisés à partir des définitions qu'on leur donne, et dont les réponses se trouvent dans les livrets TESORO AZTECA, des lettres apparaissent. Remises dans l'ordre et assemblées, elles forment le mot Marsupilami qui les dirige directement vers l'indice qui est caché auprès de celui-ci.

Matériel: des impressions couleur, pour certaines agraphées en livret
Compétence: compréhension écrite fine, dégager des informations d'un texte
Sujet associé: les aliments et plats de base dans la culture aztèque

4. Leyenda (texte à erreurs)

https://nuage.girofle.cloud/apps/files_sharing/publicpreview/FcJXg9HFiDcN4Px?file=/&fileId=305009&x=1366&y=768&a=trueA partir de deux textes similaires, les joueurs doivent repérer et dégager les mots qui n'y ont pas leur place pour former des phrases qui donnent directement l'emplacement du prochain indice.

Matériel: des impressions couleur
Compétence: compréhension écrite fine, vocabulaire
Sujet associé: les légendes aztèques cosmogoniques, la traduction

5. Aztlan (compréhension orale)

https://nuage.girofle.cloud/apps/files_sharing/publicpreview/s6SfJYiDpE7sG8W?file=/&fileId=304934&x=1366&y=768&a=truehttps://nuage.girofle.cloud/apps/files_sharing/publicpreview/cMibNBJPzkKC2ZJ?file=/&fileId=304935&x=1366&y=768&a=trueA partir d'un document vidéo accessible sur des tablettes tactiles, les joueurs doivent comprendre et noter une liste de mots qui, une fois entrés dans une table numérotée, leur donne le nom de 2 symboles.

Matériel: des impressions couleur, des tablettes tactiles porteuses du document vidéo
Compétence: compréhension orale fine, orthographe
Sujet associé: la légende des terres aztèque ancestrales d'Aztlan

6. Dioses aztecas (logigramme)

https://nuage.girofle.cloud/apps/files_sharing/publicpreview/gPZBeGSkBto3jAF?file=/&fileId=302879&x=1366&y=768&a=truePar élimination, les joueurs doivent déduire lequel des dieux représenté s'appelle Huitzilopochtli. Sur une collection d'affiches accrochées au mur, l'apparence des dieux aztèques est associée à plusieurs symboles, dont celle de Huitzilopochtli, qui est le seul à guider les joueurs vers l'indice suivant.

Matériel: des impressions couleur
Compétence: compréhension écrite, observation, déduction logique
Sujet associé: le panthéon des dieux aztèques

FINAL. Mural (puzzle)

https://nuage.girofle.cloud/apps/files_sharing/publicpreview/fecJA4APjYfJYaJ?file=/&fileId=303087&x=1366&y=768&a=trueChaque indice trouvé par la fouille est un morceau de puzzle, un morceau du "mural" qui compose une addition. Cette addition donne un nombre à 4 chiffres qui est la combinaison du cadenas qui enferme le trésor et la clé symbolique de la fin du jeu.

Des morceaux d'un autre "mural", celui-ci inutile, sont eux aussi dissimulés dans la pièce. Cet autre puzzle qui ne s'associe pas au premier est un piège qui ne mène nulle part.

Matériel: des impressions en couleur découpées selon les pointillés
Compétence: calcul, observation
Sujet associé: peinture, ville de Tenochtitlan

Le matériel

Le matériel, ce n'est ni plus ni moins que les éléments physiques que les élèves vont pouvoir voir, toucher, manipuler, transporter dans la classe, et qui feront partie intégrante de leur expérience de jeu. Le matériel fait donc partie des choix, mais surtout des contraintes, qui ont fait ce à quoi ressemble le jeu aujourd'hui.

⚠️ Ne prenez pas le matériel à la légère, car c'est lui qui façonnera réellement votre jeu: il sera le moyen par lequel les joueurs intéragiront avec vos énigmes, et le support visuel qu'ils retiendront de leur expérience.

Globalement nous avions besoin de, et nous nous sommes donc procuré:

Pour penser et gérer tout ce matériel, nous avons créé un document exprès, sur lequel nous cochions le matériel que nous avions ou qui nous manquait.

Budget et matériel acheté

Nous en avons eu pour environ 61€ d'achats pour la création du jeu, parmi lesquels 16€ de récompenses pour les élèves. Le budget du collège qu'il nous était permis de dépenser était de 35€, mais nous n'en avons finalement utilisé que 26€ par choix. Les 35€ restants sont sortis de notre poche.

Le matériel que nous avons acheté avec ce budget comprend: un coffret style ancien qui contenait les récompenses, un petit cadenas à chiffre capable de fermer ce coffre, des feuilles A4 cartonnées pour donner un style ancien au papier, et une poche de 76 anciennes pièces de monnaie à offrir aux joueurs victorieux.

Réemploi du matériel déjà sur place

Le jeu aura lieu dans la salle de cours de Patricia, sur ses heures de cours. Nous utilisons donc au mieux les éléments de la salle déjà présents et les réemployons:

Apport de matériel extérieur

Nous avons encore apporté sur place des objets simples et pas trop encombrants: pots de fleur vides, peluches d'animaux, draps divers et colorés... de la salle des profs, nous avons aussi récupéré un immense trophée de sports qui sert de décor.
opportunité présente au collège de Patricia: une flotte de tablettes tactiles qui peuvent être réservées par les professeurs. Nous en réservons 3 pour l'énigme de compréhension orale.

🤔 Deux idées de matériel hyper-polyvalent que nous avons peu exploitées:
LE DRAP: il peut s'accrocher et se poser partout facilement, il ne se casse pas, il n'est pas lourd, il existe en infinité de couleurs et de motifs, et il change à très moindre frais tout le ressenti d'une pièce.
LA LUMIERE: le commerce vend des ampoules à intensitévariable, plusieurs couleurs intégrées, effets de transition multiples... toute une panoplie d'outils qui permettent de créer des ambiances fortes, de couvrir un mur ou de délimiter des espaces. A prendre en compte cependant: trouver un moyen d'intégrer les luminaires dans le reste du décor, sans que les cables trainent partout ou que les sources de lumières ne fassent tâche.

Création de matériel

Enfin, une très grosse partie des consignes et supports d'enquête et de réponses des joueurs a été conçue au format papier. Je n'ai pas fait le compte exact des documents papier imprimés, mais il y en a pour un bon gros paquet de feuilles.

Il a aussi fallu créer deux média vidéo: le compte à rebours, projeté au mur pendant toute la durée du jeu, et le document de compréhension orale, déniché sur internet après quelques recherches.

📆 Historique: comment le jeu a été construit

Avant d'arriver à ce beau saucissonage de mécaniques ludiques et d'objectifs pédagogiques, il nous a fallu verser un certain nombre d'heures de travail au service de notre objectif.

Nous avons travaillé à deux et en présentiel la plupart du temps car ça nous motivait tous les deux beaucoup plus, et le tout sur une période étirée d'un an environ. En temps de travail cumulé, et en partant sur une base approximative de 6h de travail par jour et par personne, j'estime que nous avons passé environ 250 heures sur ce projet, soit près de 30 jours de travail à 8h/jour !! A retenir que ce total est tout de même partagé entre deux personnes, soit 15 jours de travail par personne sur le projet.

Autant de temps pour un jeu qui durera moins d'une heure, ce n'est pas rien. Il est donc essentiel que cette expérience, certes très courte, soit suffisemment marquante pour les élèves. Personellement j'en était très conscient et j'ai essayé de faire de mon mieux tout essayant de nous ménager.

De manière générale, le jeu s'est construit sur des opportunités.

avril 2022

(3h, x2)

Première réunion de projet, et premier remue-méninges sur nos envies et contraintes respectives.
Notre premier boulot et petit plaisir a été de trouver un thème... nous mélangeons toutes nos petites idées et finissons par opter pour une sorte de temple canibale détéré au milieu de Mexico City, menacé par les eaux et piégé par ses anciens habitants.

Nous tentons de nous renseigner sur les escape game pédagogiques qui existent déjà: dans les manuels de cours, sur internet, sur le site de Scape... mais n'y trouvons pas de ressources pertinentes avec ce que nous voulons faire : beaucoup de ces jeux utilisent des gadgets numérique longs à maitriser et peu intéressants à mettre en place. Beaucoup d'autres encore déguisent des exercies de cours en énigme de jeu, et ce n'est pas ce que nous voulons faire.
Paradoxalement, connaissant bien le montage vidéo car en ayant longtemps fait, je me lance dans la création d'un compte à rebours vidéo qui sera projeté sur le tableau blanc de la salle.

mai 2022

(4x6h, x2)

Premières journées de travail sur le projet. Le plan de jeu, la thématique et les compétences à mettre en jeu sont mises sur le papier. Sur cette période, nous faisons un gros travail de recherche sur l'univers du jeu, pour esssayer de trouver des axes intéressants par lesquels aborder l'histoire et la culture aztèque. Comme les compétences évaluées en classe de langue sont très clairement définies, nous associons une compétence à chaque énigme, mais je propose de ne choisir les énigmes à proprement parler qu'après avoir trouvé les thèmes qu'il nous intéresse de développer. Nous trouvons d'ailleurs le document vidéo qui servira de compréhension orale après que j'ai l'ai modifié.

Devant l'ampleur des tâches à accomplir, nous réalisons l'étendue du chantier et décidons de reporter le projet à l'année suivante.

février 2023

(5x6h, x2)

Redémarrage du projet. La base de travail que nous avions pondue l'année précédente étant très saine, nous nous remettons efficacement au travail. La direction de nos énigmes se précise, et faisons encore beaucoup de recherche documentaire sur les aztèques, ainsi que sur les jeux à intégrer aux énigmes. Un bon tiers du jeu est défriché.

C'est à ce moment que nous saisissons également l'importance du matériel, et du budget qui le limitera: il façonnera l'image du jeu.

avril 2023

(6x6h, x2)

Nous travaillons à mettre en place le premier tiers de jeu précisé à notre dernière rencontre. Les problèmes et solutions se succèdent et nous avançons doucement, mais sûrement. En voulant lier les énigmes entre elles et contenir l'indice qu'elles donnent dans leur solution, je mets en place le système des symboles, que j'appelle "détrompeur" (à tort). Nous finissons de rechercher et mettre à plat les deux-tiers restants des énigmes.

mai 2023

(4x6h, x2)

Le temps nous manque déjà. Fort des problèmes rencontrés précédemment, nous répartissons notre temps entre création des éléments ludiques des énigmes pour Patricia et création des supports graphiques sur lesquels elles se reposeront pour moi.

entre mai et juin 2023

(2x6h)

Sur cette dernière période, je travaille seul car Patricia ne peut pas m'aider. Il reste encore énigmes incomplètes, nottemment l'énigme finale qui doit toutes les lier. N'oublions pas les achats de matériel et la préparation de la salle ! Malgré nos recherches, nous ne trouve pas de cadenas à 4 chiffres assez fin pour fermer notre coffret. En dernière minute, je change l'énigme finale pour remplacer le code à 4 chiffres par un code à 3 chiffres.
L'avant-veille du premier jour de jeu, je passe un moment au collège pour échanger avec l'équipe pédagogique et comprendre où sont les outils dont j'aurais besoin et comment les utiliser: vidéoproj, ordinateur, tablettes tactiles.

Ce qu'il s'est vraiment passé ✨

Jeudi matin

Nous y voici, c'est le jour J. Nous voilà partis pour 3 sessions de jeu: 2 ce matin-même à 10h puis à 11h, et la 3ème le lendemain, à 8h.

J'arrive sur place dès 8h30 pour mettre la salle en place, en me disant qu'1h30 sera bien suffisant. Après un rapide bonjour pour me signaler à l'entrée, je file récupérer des documents qu'on m'a imprimés et je monte tout disposer à l'étage.

J'ai prévu de longue date une liste des objets à mettre en place, les endroits où tout positionner, et les réponses à chaque énigme, je n'ai plus qu'à suivre mes propres instructions. Pas le temps d'être anxieux !

⚠️ Tous les objets que les joueurs pourront atteindre et manipuler SERONT manipulés.

Une fois entrés dans la salle, les joueurs sont en jeu, et pourront se mettre à interagir avec des parties de la salle et ses objets qui leur sont d'habitude interdits. Si certaines zones de l'espace de jeu leur sont interdits, signalez-le clairement. Si rien dans la salle ne leur est interdit, signalez-le tout aussi clairement.

Le matériel physique est rapidement mis en place, après quelques découpe-collages de papiers et d'énigmes. Le vidéoproj et l'ordinateur fonctionnent comme prévu... mais pas les tablettes. Impossible de se connecter à internet. Je galère seul pendant une bonne 20aine de minutes, je finis par me connecter, télécharger la vidéo et la mettre en place mais sur 1 seul des 3 écrans. Bah ça suffira, et puis ça sonne, c'est déjà l'heure du premier groupe. En selle Gretel !

1er groupe

Les élèves attendent dans la cour, vaguement regroupés devant le numéro de leur classe. Je réalise soudain que 1) je ne sais pas quelle classe je dois récupérer 2) ils ne savent pas qui doit les récupérer 3) je ne sais pas quelle est la méthode pour récupérer une classe. Heureusement j'ai apporté un chapeau de paille pour faire décor, que je mets sur ma tête. Déjà on me repère, on me dit bonjour. C'est vous la classe d'espagnol ? oui. Je finis par avoir le numéro de leur classe, je les appelle et ce que j'évalue être une vingtaine d'élèves (le compte y est a peu près) fini par me suivre dans les couloirs.

Devant l'entrée de la salle, ça brouhaha doucement, mais ça m'écoute. J'ai préparé une liste de points à aborder avec le groupe avant de commencer. Comme tous les élèves ne sont pas au courant qu'il y a un jeu d'évasion de prévu, je commence par là: je me présente, et présente ce qu'on va faire. Et puis je bascule en mode scénario: "Ah je suis bien content de vous voir, le temps est très instable et la Professora a disparu !...". Je ne sais pas si ça marche mais les élèves sont attentifs (peut-être à cause du pion qui nous a subrepticement rejoint pendant le briefing). Je leur demande de se mettre en groupe, alors tout de suite ça copine, ça se tape sur l'épaule, mais je ne m'arrête pas et on écoute. Visiblement, la nouveauté de ma présence et de l'activité fait déjà son petit effet. Et puis je les fait rentrer par groupe dans la salle.

Je n'ai pas mis toutes les chaises aux tables, volontairement pour ne pas faire trop "exercice", mais comme l'activité demande de se poser un certain moment et d'écrire, ils déballent tout et s'asseoient finalement. De manière assez surprenante ils ne commencent pas par fouiller dans la salle. Peut-être parce que je leur ai dit que les énigmes étaient sur les tables ? ils s'asseoient sagement et puis même certains lèvent la main. Mais comme je ne leur réponds qu'à moitié en disant que je ne sais rien, toujours dans mon perosnnage de guide touristique paumé. Ils comprennent finalement qu'il faudra se débrouiller un peu seul. Ce qui ne m'empêche pas de glisser un indice ou deux, encourager les bonnes hypothèses, etc.

Il y a une équipe qui traine et qui n'est pas dedans -- dans tous les groupes il y en aura une -- le pion est avec eux et, pris par le jeu, tente de les motiver. Ceux-là je dois venir les presser à coup de scénario, à coup de "l'équipe compte sur vous!". Au mur, la vidéo projetée change de ton (comme prévu): le temple s'effondre et la jungle laisse place à un mur de pierre et un compte à rebours qui affiche 30 minutes restantes. Visiblement, c'était l'effort qu'il manquait pour leur donenr l'envie ! les voilà projetés dans le jeu.

Les 40 minutes de jeu passent en un éclair, déjà ils sont presque à la fin, il leur manque juste un bout de puzzle... je pousse le compte à rebours d'une minute et demi sans qu'ils s'en aperçoivent, je les encourage... ils se précipitent sur le trésor, essaient des codes, je grignote encore quelques secondes... Puis finissent pas ouvrir le coffre et gagnent le jeu.

La suite est très rapide. A peine le temps de distribuer leur récompense, la fin de l'heure sonne et tout le monde récupère ses affaires. On me lance quelques Au-revoir et Merci et soudain la salle et vide... oh. Oh mince. Le prochain groupe va arriver, d'une minute à l'autre!

2ème groupe

Oh mince oh mince oh mince. Je recupèr toutes les feuilles utilisées apr les élèves, gribouillées, dispersées, je les remplace par des feuilles neuves imprimées par avance, je récupère les morceaux de puzzle, je cache tout à nouveau, je remets les objets en place, je remets la vidéo au début, les élèves sont dehors et attendent, tenus par la principale adjointe qui prendra la place du pion sur cette heure (nous étions toujours 2 adultes dans la salle à chauqe session). J'y suis depuis 10 minutes ? 15 minutes ? je revérifie une dernière fois que tout est en place, je sors de la salle.

⚠️ Ne faites pas comme moi: prévoyez un temps de préparation avant la session de jeu... mais n'oubliez pas un temps de remise en place à la fin de chaque session également !

A nouveau le petit discours d'introduction. Cette fois je tente autre chose: "Il me faut une équipe d'experts en conjugaison ! en repérage sur un plan ! en dieux mexicains !..." ça les motive très bien et ils entrent avec l'envie de bien faire. Et puis comme Patricia n'est pas là j'ai une idée, j'ajoute: "la Professora Patricia est une experte aztèque qui était venue étudier le temple, mais elle a mystérieusement disparu en laissant des recherches en plan, heureusement que vous êtes là pour nous aider !". Un chouette moyen de lier réel et imaginaire, ce qui semble les faire sourire. Et puis je crois aussi que les appeler "les experts" ça leur plait bien, autant qu'à moi: on sait tous très bien qu'ils ne sont pas du tout experts en espagnol, ni en culture aztèque, mais ça leur donne du courage, et leur permet de rentrer dans leur rôle avec humour.

Pendant que nous étions en création avec Patricia, j'imaginais le jeu se dérouler avec un minimum d'interaction de la part de l'animateur, mais visiblement ils en ont bien besoin. Encore une fois je fais le tour des tables, regarde comment les énigmes avance, et encore une fois il y a un groupe qui traine des pieds, ça lève la main, je glisse des demi-indices... c'est suffisant, et pas trop dirigiste.

Cette fois, je constate clairement des problèmes sur mes énigmes. Rapide tour d'horizon: la compréhension orale est trop exigeante en compétence et en concentration, la consigne de la Leyenda n'est pas claire du tout, et les conjugaisons sont faites en 5 minutes montre en main. Mais les énigmes s'entrebalancent étrangement, pour le meilleur: ceux qui avaient très vite fini l'exercice se retrouvent bloqués sur une bêtise que je laisse traîner (et qu'ils finiront par résoudre seuls), et les équipes sur la compréhension orale et la Leyenda trouvent un moyen de contourner deux-tiers de l'exercice pour avoir la solution en avance. Ils ont l'impression de casser le jeu, de tricher, d'être plus intelligents, tout en résolvant les problèmes d'équilibre: parfait !

Autre constat -- que j'avais pourtant prévu mais qui me surprends -- une fois qu'une équipe a trouvé un morceau de puzzle, elle se met à chercher dans toute la pièce les morceaux restants, et finit par en trouver 5 sur les 6 requis. Ce n'est pas très grave, mais c'est franchement dommage car pendant ce temps d'autres groupes travaillent encore aux énigmes qui devaient indiquer l'emplacement de ces bouts de puzzle. Pour finalement constater qu'ils ont déjà été trouvés... décevant pour eux.
Heureusement l'un d'eux reste très bien caché et il faudra attendre que l'énigme soit vraiment finie pour le trouver (mots-croisés).

Là encore, le temps est tout juste bon pour qu'ils terminent l'énigme finale: je dois encore traficoter le compte à rebours de quelques secondes (cette fois avec la complicité d'un élève) mais ils finissent par ouvrir le coffre et sortir de la pièce.

Et là encore, tout se termine très vite: bravo, c'était super, c'est l'heure de manger ça sonne merci au revoir plus personne dans la classe.

Bilan de mi-chemin

Pendant que je range à nouveau la salle, en prenant mon temps cette fois, je constate à chaud:

  1. Personne n'a eu l'air de passer un mauvais moment
  2. Ca va trop vite
  3. J'avais pas pensé à ranger la salle entre les groupes
  4. Ya des problèmes de difficulté

Je laisse les affaires sur place et rentre travailler sur la correction de certains détails qui entravaient les joueurs: la consignes de la Leyenda, dont je clarifie une bonne partie des visuels, et l'une des deux consignes du plan, auquel il manquait un tout petit bout de phrase qui changeait toute l'énigme. Je fabrique également un panneau "Symbolos" pour bien signaler leur nom et leur présence au mur. Et comme il me reste du temps, je change le code du coffre et j'imprime le même puzzle modifié avec le code écrit en toutes lettres (comme ça ça reste de l'espagnol). Et puis je vais dormir.

https://nuage.girofle.cloud/apps/files_sharing/publicpreview/YBKmDsBwm5T6sX6?file=/&fileId=324165&x=1366&y=768&a=true

mural avec l'énigme en toutes lettres

3ème groupe

Le matin du second jour, on remet le couvert. Les énigmes et documents modifiés la veille sont remplacés, je vérifie que tout est en place. Les tablettes sont fonctionnelles cette fois, mais même avec un casque que j'ai pu trouver en fin de matinée la veille, je sais que l'énigme sera difficile.

Je vais trouver les élèves dans la cour et devant la classe quand je commence ma petite introduction, je sens que l'ambiance est différente: petite tête et petits yeux, Et oui, il est 8h du matin, c'est difficile. J'oublie encore certaines consignes à leur donner.
Un fois dans la salle effectivement je constate: ils sont assis devant leur table, ça parle peu, ça regarde sans trop savoir quoi faire. Lentement on prend sun crayon. Allez, c'est pa grave, ils vont se mettre en route ! Comme pour les autres groupes je fais le tour de la salle, je les encourage. Cette fois ils sont 20 élèves: il manque donc une équipe sur l'énigme des conjugaisons. Qu'à celà ne tienne, je redirige une équipe qui galérait sur les Dioses aztecas, et qui se trouve tout de suite mieux à sa place, et qui avance. Ca leur donne de l'énergie, qu'ils communiquent au reste du groupe !

Sur l'énigme de compréhension orale, ça patine encore, comme je m'y attendait. C'est encore une fois une équipe d'élèves en difficulté qui s'y est collée, mais qui a de la bonne volonté, c'est eux qui me disent "Monsieur, vous avez choisi les plus nuls de la classe!". Malgré mes appels dans les autres groupes personne ne vient les aider, mais j'arrive à les aiguiller pour qu'ils réussissent au moins une partie de l'énigme... au final le morceau de puzzle qu'ils devaient trouver sera découvert par un élève zélé, et même sans avoir terminé cet objectif, les joueurs finiront par ouvrir le coffre et terminer le jeu (avec moins d'une minute d'aide au chrono).

Comme avec les autres groupes, la fin sera expédiée sans pouvoir leur demander de retour construit, un manque cruel que je commence à ressentir. J'arrive tout de même à les retenir un moment pour leur expliquer les énigmes qu'ils ont réussi et la solution aux énigmes râtées.

Ne manque plus qu'à tout remballer, ce qui me prends 2 heures tranquilles tandis que je ressasse les comportements de chacun et ce qui a fonctionné ou pas.

Ca y est, c'est fait !

BILAN

Quand on fait l'addition de tout ça, quel bilan peut-on dresser ?

Conditions de jeu/création de jeu

Nous nous étions fixés certaines conditions avant de nous lancer. Les a-t-on respectées ?

  1. Temps disponible: nous avons aisément réussi à nous dégager assez de temps en commun pour travailler sur le jeu. il m'a personellement fallu quelques séances en solo pour terminer le travail commencé à deux, car la cohérence visuelle des supports était importante à poser selon moi, mais ces rattrapages n'étaient ni excessifs, ni inutiles. le total d'heures cumulées est important, mais le travail l'était tout autant aussi je crois que nous avons fait de notre mieux.
  2. Outils familiers: malgré notre volonté, nous avons tout de même utilisé des outils avec lesquels nous n'étions pas toujours familiers: Patricia avec les services de cloud et d'édition collaborative de documents avec Cryptpad et Nextcloud, moi avec Inkscape, pour la création des visuels, et les tablettes Apple que je n'avais jamais utilisées.
    Des outils inhabituels auxquels nous nous sommes habitués assez vite après quelques erreurs, car ils étaient proches de ceux que nous connaissions déjà.
  3. Hispanophonie: tous les jeux étaient rédigés en espagnol, c'est vrai, mais comme je ne parle pas couremment espagnol, il m'était impossible d'imposer cette langue comme unique langue de communication pendant le jeu. pour être honnête, je pense que des élèves de 3eme auraient été incapables de terminer le jeu en aussi peu de temps et dans ces conditions, donc c'était une décision juste selon moi.
    De plus, comme le jeu avait surtout un but ludique, et pas forcément pédagogique, cet aspect n'était pas du tout obligatoire, la condition est donc bien remplie.
  4. Accessibilité: bilan mitigé sur cet aspect puisque comme soulevé déjà plus haut, les élèves avaient tous un niveau d'espagnol et des compétences très différentes. le prédécoupage de chaque groupe en équipes n'a pas très bien marché car il était factice, et ne correspondait à rien d'autres qu'aux affinités des élèves les uns pour les autres. peut-être un jeu plus destructuré aurait paradoxalement mieux marché, en laissant les joueurs se regrouper naturellement une fois en jeu, laissant les plus déterminés diriger le groupe, tout en gardant un foisonnement d'activité petites ou grandes qui auraient satisfait plus de profils différents.
    D'un autre côté, c'est aussi parce que les énigmes n'ont pas toutes la même difficulté, et ce n'est pas grave, c'est même mieux si tout n'est pas aussi dur ou aussi long car ça créé des dynamiques inégales qui ajoutent de la vie et de l'imprévu dans la réalisation de l'escape game, et ça les incite à demander de l'aide ou aider lorsqu'il y en a besoin.
  5. Unité de temps/lieu: nous n'avons pas cherché à faire autrement et tout s'est bien déroulé, à l'exception de la remise en place du jeu entre les deux sessions du jeudi. nous avons bien essayé de déplacé le cours du vendredi au jeudi dans la journée mais ce n'était pas possible, ou en faisant du jonglage avec tout un tas d'autres professeurs, ce qui n'en valait pas la peine. au final, on peut dire que la condition a été respectée

Le cas particulier des symboles...

C'est en construisant l'énigme Leyenda que j'ai commencé à encoder les réponses des énigmes avec des symboles aztèques. Dans cette énigme, il avait fallu dissimuler la totalité des mots qui composent les 3 phrases réponse dans un long texte, et amener les joueurs à trouver ces mots puis les assembler dans le bon ordre. Construire 6 énigmes qui fonctionnaient de la même manière tout en restant différentes et intéressantes me paraissait infaisable.
Rapidement l'idée d'avoir un tableau de correspondances m'est venue: il suffirait alors que les énigmes résolues donnent au joueur un simple mot ou un chiffre qui aurait sa correspondance dans le tableau, qui lui ne serait pas limité en taille de place ou d'informations. Ce système de correspondances je l'ai appelé "détrompeur" à tort, car ce n'en était pas du tout un. Mais j'aimais bien le mot quand même alors je l'ai gardé !
D'abord les symboles étaient simplement associés à une indication de lieu: gauche, droite, table, mur, sud, ouest etc... Puis l'énigme Recetas à été construite pour donner des chiffres en la résolvant, alors j'ai associé un nombre à chaque symbole. Puis l'énigme Aztlan donnait le nom espagnol du symbole alors j'ai dû associer chaque symbole à son nom espagnol également... à chaque énigme supplémentaire le tableau de correspondances se compliquait, mais on ne pouvait plus faire marche arrière.

Au final, cette solution qui devait aider à la construction des énigmes en les standardisant n'a fait que les compliquer et m'a demandé beaucou plus de travail supplémentaire pour tout unifier à nouveau.
Et pour les élèves ce n'était pas mieux, celà demandait un moment de décryptage avant la fouille qui les ralentissait, voir les bloquait.
Pourtant je continue de penser que l'idée de base était bonne, thématiquement et ludiquement, mais il faudra penser à une meilleure façon de l'intégrer une prochaine fois. Je me suis sans doute trop précipité pour l'essayer tout en l'intégrant aux jeux que je faisait, sans réfléchir à la complexité qu'elle apporterait au fur et à mesure de la création.

Ce qu'on aurait voulu changer

Le premier regret qui nous vient à tous les deux concernant ce jeu d'évasion, c'est le cruel manque de retour auquel nous n'avions absolument pas pensé. Nous n'avons pas pensé à un moment de partage autour de l'expérience de jeu avec les élèves, ou un papier qu'ils auraient pu remplir pour nous donner leurs impressions.
En création, je crois que j'imaginais ce retour se faire de manière informelle auprès Patricia, en fin de jeu ou au hasard des couloirs. Clairement nous avions tort, et cet article de Scape -- qui détaille l'importance capitale de ces retours -- ne nous fera pas dire le contraire.

En parlant de Scape, je regrette que nous n'y ayons pas passé plus de temps, car en prenant le temps et en cherchant mieux, je trouve maintenant des outils et des retours d'expériences qui nous auraient beaucoup servi au début... malheureusement je crois, ces outils ont tous un format très théoriques qui demandent de potasser beaucoup avec de faire de la pratique, ce qui est très frustrant. Parfois la pratique est plus parlante !

Evidemment il y a eu quelques petites erreurs dans les jeux, qui ont été corrigées ou réorientées sur place, ou après coup sur les documents: ici un oubli dans une consigne, là une étape de l'énigme qui n'était pas claire... mais dans son ensemble et bien heureusement, la structure de l'évasion n'était pas cassé ou cassable facilement. Un grand soulagement !
J'ai quelques autres nouvelles idées d'amélioration pour une hypothétiques prochaine fois, que Patricia pourra faire jouer j'espère ! Des améliorations qui permettront de rendre les joueurs plus actifs dans la fouille et l'observation, et les empêcheraient de trouver des indices qu'ils ne sont pas sensés trouver.

Une volonté que nous avions mais sur laquelle nous n'avons pas été assez attentifs: faire d'abord un bon jeu et ensuite un jeu pédagogique. Tôt dans la création j'ai suggéré de baser chaque énigme sur une compétence différente en espagnol, ce qui nous a aidé à trouver des énigmes, mais a posteriori, nous a aussi enfermés dans une certaine façon de voir le jeu. Maintenant que je regarde nos énigmes et la façon dont nous les avons faites jouer, je vois ce que je ne voulais pas faire: c'est-à-dire des exercices d'espagnol déguisés en énigmes.
Mais nous avons fait avec ce que nous avions, et ça nous a permis de faire sinon des énigmes, au moins des exercices intéressants !

Concernant la fouille, les objets décoratifs qu'on avait choisis et qui étaient fragiles ont été cassés... la loi du Murphy frappe encore, ou comme dit un autre adage "les exceptions sont amenées à se reproduire". Et puis certains objets ont été volés, ça, nous ne pouvions pas le prévoir. A l'avenir, il faudra penser "volumineux mais pas lourd ni fragile" pour les objets d'enquête, se reposer uniquement sur les objets standardisés de la salle, à savoir chaises, tables, et papiers ou affiches à accrocher un peu partout, ou utiliser du matériel peu cher qui ne souffre pas d'être perdu détruit ou volé (le papier par exemple, c'est parfait).

session de jeu 2

Au final...

On en est arrivés à bout !!

La mise en place d'un jeu d'évasion est une sacrée aventure qui demande du temps, de l'engagement, et beaucoup de créativité et que nous l'ayons fait c'est déjà une grande fierté. Il y aura très certainement une deuxième édition pour que Patricia puisse faire jouer le jeu à ses élèves comme il se doit, et d'ici-là nous pourrons bouger un ou deux paramètres pour rendre le jeu encore meilleur !

La grande majorité des élèves semblaient attentifs, sinon appliqués dans le jeu, et ils ont au moins été contents de réussir cette épreuve ensemble. Encore une fois il nous aurait fallu plus de retours directs, mais la sensation sur le moment était bonne.

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